Eric Delassus : “Le leadership de demain sera basé sur la vulnérabilité.”
Depuis le confinement, les entreprises ont dû adapter leurs façons de travailler. Pour certaines, il a fallu parier sur le télétravail. Ce dernier a permis aux salariés de jouir d’une plus grande autonomie mais, relève le philosophe et chercheur Eric Delassus, cette tendance est aussi à “double tranchant”. Elle peut induire une perte de repères et, par conséquent, pousser les salariés à s’investir excessivement dans leur travail.
Ce constat illustre bien les bénéfices et risques qui peuvent découler d’un management prenant en considération la vulnérabilité. “Il ne faut pas voir la notion de vulnérabilité en général, et dans le management en particulier, comme une faiblesse ou une fragilité mais plutôt comme une idée de dépendance”, explique Eric Delassus. “Cette notion s’inspire des éthiques du care, venues des États-Unis. Ce terme, intraduisible en français, renvoie à quelque chose qui va bien au-delà du soin. Les éthiques du care remettent en question l’idée de la perception que l’être humain est un individu autonome”. Dans le monde du travail, on les appelle self-made man ou self-made woman, ces gens dont on prétend qu’ils se sont faits et ont réussi tout seul.
La dépendance à autrui : une force insoupçonnée
Mais selon Eric Delassus, dans la vie comme au travail, “nous sommes tous et toutes dépendantes les uns des autres”. Être vulnérable, c’est s’opposer à ce mythe de la self-made personne et reconnaître sa dépendance aux autres pour la voir comme “une force et une capacité à enrichir les liens qu’on entretient avec les autres et leur permettre d’être créatifs et innovants. La prise en compte de la vulnérabilité est une source d’enrichissement humain”, souligne le philosophe.